Savez vous…
Savez vous toute l’excitation bienfaitrice
Qui s’empare de tout musicien de génie
Lorsque quelque douce mélodie tentatrice
Se met à danser sous ses doigts avec délice
Ramenant son corps et son esprit à la vie
Le temps de quelques accords au charme infini
Savez vous l’indicible bonheur qui transporte
Le valeureux qui après des années d’exil
Où la grande solitude pesait si forte
Vit soudainement s’ouvrir devant lui les portes
De ce cachot qui lui avait servi d’asile,
Liberté retrouvée d’un pauvre homme servile
Savez vous le réconfort des jeunes enfants
Dont le sommeil perturbé par de vils cauchemars
Trouvent refuge dans les bras de leur maman
Geste naturel enfantin sécurisant,
Alors bercé bien à l’abri de tout regard
Ils s’endorment paisiblement dans la nuit noire
Savez vous la terrible mais si douce peur
Au corps de l’amoureux transi sous le balcon
De sa si belle qu’il guette depuis des heures,
Tant d’innocence, de pureté, de candeur
Capables d’éveiller un nid de papillons
Dans un cœur candide saisi par la passion
Savez vous la douceur de certaines soirées
Lorsque la fraîche rose décide d’éclore
Fragile naissance sous la nuit étoilée,
Merveille d’une nature aux trésors cachés,
Reine à robe rouge parmi les boutons d’or,
Beauté resplendissante aux lueurs de l’aurore
Savez vous le sentiment de sérénité
Que peuvent inspirer les plus beaux paysages
De cette aurore boréale enchantée
Au soleil se couchant sur les monts enneigés
Douceur veloutée d’une nature sauvage
Qui règne en maîtresse d’un monde au sommeil sage
Savez vous la flamme qui réchauffe le cœur
De tout marin, qu’il soit le plus grand des pionniers
Ou le plus pauvre et le plus simple des pêcheurs
Quand au hasard des flots il jouit de la splendeur
D’un ballet de dauphins aux reflets argentés,
Anges et souverains des mers du monde entier
Si vous savez les sentiments que j’ai décrit
Leur sincérité, leur beauté et leur puissance
Alors vous saurez l’émotion qui me saisit
Lorsqu’il pose sur moi un regard attendri
Et vous comprendrez le bonheur de sa présence
Comme la douleur que peut laisser son absence